Homélie du 7 août, 19ème dimanche du Temps Ordinaire – Année C

Notre époque ne manque pas de prophètes de malheur. Chaque jour, ils nous prédisent l’effondrement : effondrement économique, climatique, politique, et même spirituel. Face à ce climat morose, beaucoup sombrent dans la dépression, d’autres choisissent de ne pas voir, tandis que les derniers se disent : « Puisque tout est foutu, mangeons et festoyons ! »

Le monde où vécu Jésus n’était pas plus facile. Quelle fut donc sa réponse face au chaos ambiant ? « Convertissez-vous et croyez à la bonne nouvelle : le Règne de Dieu s’est approché ! » Jésus ose parler de bonne nouvelle, d’un bonheur enfin accessible. Quel est-il ? Dieu n’a pas déserté notre monde. Jésus vient même naître, vivre et mourir au cœur des failles de notre monde. À quoi reconnait-on sa présence ? « Les aveugles voient, les sourds entendent, les pauvres sont reconnus et aimés… » La présence de Jésus donne aux petits et aux pauvres de croire en eux-mêmes, croire en une vie possible. Sa parole est crédible parce qu’il est l’un de ces petits. Pauvre parmi les pauvres, il est témoin du bonheur de se savoir aimé par le Père.

La mort de Jésus marquera-t-elle la fin d’une parenthèse heureuse ? En chemin vers Jérusalem où il sera condamné et supplicié, Jésus sait que s’ouvrira une période douloureuse pour ses disciples. Il veut les y préparer en leur donnant quelques repères pour vivre l’après sans perdre l’espérance. À travers ces trois petites paraboles, Jésus nous invite à cultiver deux attitudes :

La première est de ne pas oublier la perspective de son retour, de sa venue dans la gloire qui marquera l’accomplissement de la promesse, la récapitulation de toute la création en Dieu. Sommes-nous habités de ce désir, de cette attente, tout tendus vers la venue du Christ ? « Veillez, tenez bon dans la foi, soyez des hommes, soyez forts. Que tout chez vous se passe dans l’amour » (1 Cor 16,13).

La deuxième attitude à cultiver porte sur la manière de vivre l’aujourd’hui de nos vies, la portée de nos choix, de notre manière de vivre le travail qui nous est confié : « Restez en tenue de service. » Alors, le maître, à son retour, prendra lui-même le tablier pour nous servir. Allusion au lavement des pieds. Le serviteur n’est pas au-dessus du maitre mais appelé à se comporter comme son maître.

La dernière parabole concerne spécialement les responsables de la communauté, à travers la figure de ce gérant qui, face à l’absence prolongée de son maître, peut réagir de deux façons : soit se comporter en intendant fidèle et juste, distribuant en temps et en heure la ration de nourriture qui revient à chacun des employés, plus attentif aux autres qu’à lui-même ; ou bien oublier la mission confiée pour ne plus penser qu’à soi : « ‘Mon maître tarde à venir’, et il se met à frapper les serviteurs et les servantes, à manger, à boire et à s’enivrer. »

Jésus nous invite à être de bons bergers, veillant les uns sur les autres, attentifs aux plus fragiles parmi nous, à ceux qui risquent de se perdre.

Être chrétien, ce n’est pas confortable ! C’est accepter d’être en tension entre le déjà-là du Royaume et l’attente de son accomplissement. En Jésus, tout nous est déjà donné. Par le baptême, nous avons reçu la marque de l’Esprit Saint qui fait de nous des fils adoptifs, des bien-aimés du Père des cieux, et des intendants du Royaume. Chaque jour, nous avons à déployer dans le concret de nos vies la grâce de notre baptême en mettant le tablier de service. Sans oublier la finalité de notre vie, le désir, un jour, de partager pleinement, totalement, la vie en Dieu. Nous goûterons alors la joie d’aimer comme Dieu seul sait aimer.

Marana tha ! Viens, Seigneur Jésus !

Frère Nicolas Morin

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