Homélie du dimanche 22 août 2021, 21ème Semaine du Temps Ordinaire — Année B

VOULEZ-VOUS PARTIR, VOUS AUSSI ? (Jean 6)

« Voulez-vous partir vous aussi ? »

Quelle souffrance dans la question de Jésus. Non pour lui mais pour ses disciples qui risquent, en lui tournant le dos, de refuser la Vie offerte par le Père.

Pourtant, la veille encore, suite à la multiplication des pains, la foule voulait faire de Jésus son roi. Mais celui-ci se dérobait, montant seul sur la montagne pour prier. N’indiquait-il pas ainsi la Source de sa vie, le pain quotidien qu’il reçoit de la main du Père ?Dans la prière m’est venue l’image d’une fontaine reliée à sa source, avec plusieurs bassins. L’eau coule en abondance de la Source, le cœur du Père, et donne vie au Fils qui se reçoit tout entier, faisant de sa vie un réceptacle de l’amour du Père. Cette eau unissant le Père et le Fils et qui ne se tarit pas, c’est l’Esprit Saint. L’eau ne stagne pas dans le bassin ; elle déborde de toutes parts, parce que la nature de l’Amour est de se donner, de se livrer afin que toute personne qui croit et participe à son tour à cette Vie éternelle.

Percuté par la question de Jésus, j’ai lu et relu l’ensemble du chapitre 6 de saint Jean cette semaine. Presque à chaque verset, il est question de Vie éternelle qui nous sera donnée lorsque nous ressusciterons avec le Christ.

Dès lors, pourquoi est-ce si dur d’accueillir la parole de Jésus ? « Elle est dure cette parole. »

Jésus nous invite à croire qu’il est le canal, le médiateur, par lequel la grâce nous est donnée, « le pain descendu du ciel ». Il est chemin vers le Père. Mais comment cet homme de Nazareth qui nous ressemble tant, dont nous connaissons les parents, peut-il avoir pareille prétention ?

Pourtant, c’est bien parce qu’il est homme comme nous, pétri de la même chair, avec ses failles et ses blessures, qu’il est capable de nous ouvrir un passage, nous offrant une réconciliation profonde avec nous-mêmes et nous révélant notre vocation qui est de vivre en communion avec Dieu de qui nous nous recevons sans cesse. Comme le disent les Pères de l’Église, « Dieu se fait homme pour que l’homme se fasse Dieu » (Saint Irénée).

L’autre chose qui ne passe pas chez les disciples, c’est le chemin emprunté par le Fils, celui du don sans retour. Jésus, par toute sa vie, se fait pain livré et partagé pour la multitude. Qui n’a pas peur de suivre Jésus sur ce chemin ? Jésus se fait pain pour la route. Il se donne à nous pour qu’à notre tour nous donnions notre vie.Hélas, nous nous arrêtons bien souvent en route. Nous adorons le Christ dans son Eucharistie, nous communions à lui avec ferveur, mais sans réaliser que nous communions à sa mort et à sa résurrection. Nous ne sommes pas prêts à vivre ce passage, à mettre nos pas dans les pas du Christ.

« Voulez-vous partir vous aussi ? »

Comme ses disciples qui lui tournent le dos, j’ai bien des fois murmuré : « C’est trop dur. » J’ai eu la tentation de laisser tomber. L’herbe est si verte ailleurs ! J’ai eu la grâce d’être habité par la parole de Pierre : « Seigneur, à qui irions-nous ? Tu as les paroles de la vie éternelle. » Oui, cette vie, si aride parfois, est pourtant le lieu où Dieu m’a planté, celui où il m’appelle à porter du fruit en abondance.

Le drame est que je peux sincèrement mettre mes pas dans ceux de Jésus, avoir tous les signes extérieurs d’appartenance, mais suivre dans la réalité un chemin parallèle, mon propre chemin. Je reprends d’une main ce que je donne de l’autre. Je reprends ma vie.

Seigneur, tu m’invites à creuser mon désir de toi, à avoir faim et soif de toi.

« Si tu savais le don de Dieu », me dis-tu.

Lorsque je m’égare et prends un chemin de traverse, donne-moi le courage de tout quitter pour te suivre.

Fais de ma vie une Eucharistie,

Action de grâce pour le don de la vie que tu ne cesses de donner en abondance,

Don que tu m’appelles à partager à mon tour.

« Oui, je crois, Seigneur. Fais grandir en moi la foi. »

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