Homélie du dimanche 7 janvier 2024 – L’Épiphanie du Seigneur – Année B

Aujourd’hui, fête de I ‘Epiphanie, fête de la manifestation du Seigneur.  A Noël il se manifeste aux bergers, aux pauvres d’Israël, aujourd’hui aux mages, des chercheurs des nations païennes.

Chez les orthodoxes qui ont privilégiés cette fête par rapport à Noël, on parle de trois manifestations : aux nations païennes, au baptême de Jésus, aux noces de Cana.

Nous avons là un récit du genre « midrash » qui à travers une histoire nous ouvre à une réalité spirituelle et théologique. Dans ce récit est déjà évoqué tout le mystère de Jésus (son rejet par une partie du peuple d’Israël, son accueil par les nations païennes).

Qui sont ces mages mystérieux qui nous ont fait rêver dans notre enfance avec la couleur de leur peau, leurs habits chamarrés, leurs chameaux et autres éléphants…?

Ils viennent de loin, des nations païennes d’Orient, peut-être de Mésopotamie, d’Arabie, ils ont sans doute pris les routes des caravanes, sans doute celles des Nabatéens dont on perçoit encore les traces en Jordanie et dans le sud du territoire actuel d’Israël.

Ce sont des mages, des devins, mal vus dans la Bible, des astrologues qui lisent dans les astres … Des chercheurs qui cherchent le sens du monde et des évènements, qui sont attentifs aux signes du ciel…

Ils ont vu son étoile (il est né sous une bonne étoile !) et ils se sont mis en route comme le lointain ancêtre Abraham, quittant leurs rivages, leurs repères et leurs sécurité habituelles.

Marche à l’étoile, aventure risquée, déstabilisante, comme souvent dans nos vies quand on tente une aventure hors du commun. Pensons à tous ces migrants qui quittent leur pays, acculés par la guerre, l’injustice, la faim et qui suivent une étoile, une espérance au péril de leur vie.

Et cette étoile les mène vers Jérusalem, cette ville prestigieuse dont ils ont entendu parler dans leurs rêves et dans leurs recherches. Mais là, l’étoile disparaît et là, avec ténacité et humilité ils vont consulter les autorités politiques et religieuses, ceux qui sont censés savoir le sens des évènements et de l’histoire.

Effectivement ces hommes politiques et religieux, en cherchant eux aussi dans leurs Ecritures vont retrouver les vieilles prophéties qui parlent d’espérance et de la venue hypothétique d’un représentant de Dieu, un Messie, un consacré par Dieu à l’image du roi David, qui viendrait sauver son peuple, comme un berger royal issu de la petite bourgade de Bethléem.

Mais ceux qui savent, qui sont censés maîtriser le sens de l’histoire ne bougent pas, ils ont peur que ce Messie royal leur enlève leurs prérogatives, leur pouvoir politique et religieux. (Ils annoncent déjà le rejet de Jésus par son peuple).

Les mages, eux, ont entendu, tout païen qu’ils sont, le message des Écritures et le chemin s’ouvre à nouveau devant eux, l’étoile les guide à nouveau vers la maison de l’enfant et de sa mère et là humblement, eux les grands et les sages, se prosternent jusqu’à terre, jusqu’au niveau de l’enfant pour l’adorer (on ne se prosterne que vers Dieu et lorsque Jésus quitte cette terre pour rejoindre son Père, les disciples se prosternent à ses pieds.)

Et ceux qui ont déjà quitté leur pays et leurs habitudes pour se lancer dans l’aventure vont déposer leurs richesses qui vont devenir des cadeaux devant l’enfant et sa mère. Hommage au mystère de cet enfant : de l’or parce qu’ils ont compris qu’il est roi, le la myrrhe parce qu’ils ont compris qu’il est homme et qu’il devra mourir avant de ressusciter, de l’encens parce qu’ils pressentent qu’il vient de Dieu.

Les gens de Jérusalem sont restés assis sur leurs trésors, leurs peurs et leurs certitudes, ces étrangers, ces païens ont osé la quête, le voyage et ils ont vu, ils se sont prosternés et ils ont cru.

Sommes-nous de ceux qui cherchent encore, qui acceptent de se remettre en route, qui osent la foi ? Ou sommes-nous enfermés dans nos questions, nos doutes, nos certitudes intellectuelles ou idéologiques?

Quelle étoile, quel signe peut encore nous réveiller, nous remettre en route ? Allons-nous nous laisser appeler par un regard, une main tendue, un sourire, une souffrance … Allons-nous oser la rencontre, l’accueil, l’étonnement, l’émerveillement?

L’étoile du Christ, la rencontre du Christ va-t-elle nous permettre d’inventer encore des chemins nouveaux dans le petit matin?

Des chemins pour la rencontre et le partage ? Des chemins pour l’espérance?

Frère José Kohler

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