Homélie du dimanche 7 mai 2023, 5ème dimanche de Pâques – Année A

VERS UNE EGLISE SYNODALE

Le passage des Actes des Apôtres 6, 1-6 entendu ce dimanche montre une communauté qui doit faire la difficile expérience de l’altérité et des inévitables conflits qui en résultent. Il est surtout intéressant dans la manière dont cette crise va être résolue.

De quoi s’agit-il ?

Le message de vie de Jésus attire de plus en plus de croyants qui rejoignent la communauté naissante. Au début, ces nouveaux convertis sont surtout des juifs de Jérusalem parlant araméen et priant en hébreu. Mais voici que bientôt des juifs originaires d’autres aires culturelles et parlant le grec se convertissent. Pas facile de vivre ensemble quand on est de cultures et de milieux différents.

Et justement, une crise éclate. Les chrétiens de culture grecque trouvent qu’il y a une ségrégation dans la communauté et que leurs veuves ne trouvent pas la solidarité qu’elles devraient avoir. La Bible appelle sans cesse les croyants à une solidarité particulière envers les veuves, les orphelins et les migrants. Parce qu’ils sont les plus vulnérables, sans ressources ni appuis. Deux types d’aide s’étaient mis en place : le portage de repas à domicile et une aide financière. Or, il semble que les veuves hébraïques aient plus de prix que les veuves hellénistes, minoritaires.

Observez bien la manière dont les chrétiens vont résoudre cette crise :

1 Les douze convoquent l’assemblée des disciples.

Ils entendent les récriminations de la communauté lésée, ils ne cherchent pas, au nom d’une unité de façade, à minimiser ou même étouffer le scandale. Ils ont le courage de regarder le problème en face et prennent leurs responsabilités.

2 « Les douze convoquèrent alors l’assemblée plénière des disciples. » Les décisions ne sont pas l’affaire de la seule hiérarchie mais d’une communauté rassemblée dans l’Esprit Saint pour réfléchir à ce qu’elle vit et discerner les réponses les meilleures aux questions qui se posent à elle. Il y a là l’amorce de la synodalité si chère à notre Pape François.

3 Ils exposent clairement le problème : « Il ne convient pas que nous délaissions la parole de Dieu pour le service des tables. » Ils refusent d’être des hommes orchestres, sensés être compétents dans tous les domaines. Si tous les baptisés sont égaux en dignité, ils n’ont pas tous le même charisme, ne sont pas tous appelés à la même mission. La mission des Apôtres est la formation à l’intérieur de la communauté et l’évangélisation à l’extérieur. Et, s’ils ne veulent pas se disperser, leur prédication doit s’enraciner dans la prière personnelle et communautaire.

4 Ils suggèrent alors une solution : « Cherchez plutôt parmi vous sept hommes de bonne réputation, remplis d’Esprit et de sagesse, et nous les chargerons de cette fonction. »

La communauté tout entière est responsable de l’appel. Regardez bien quels sont les critères de discernement, les qualités requises : « Des hommes estimés de tous, remplis d’Esprit Saint et de Sagesse. » Autrement dit, des hommes suffisamment mûrs pour s’être confrontés à leurs limites, conscients de leur pauvreté, mais confiants dans la force de l’Esprit de Dieu qui les habite. Des hommes assez sages pour mettre leur foi et leur confiance en Dieu plutôt qu’en eux-mêmes.

5 On appelle alors ces hommes pour les présenter aux apôtres qui prient et leur imposent les mains. A ceux qui sont appelés, Dieu donne la force de son Esprit pour accomplir sa mission.

Ce passage est très important pour notre vie en communauté.

Savons-nous nous retrouver simplement pour nous dire nos manques, nos divergences, les attentes des uns et des autres et nous demander comment nous pourrions y répondre ensemble ?

Trop de chrétiens quittent l’Eglise sur la pointe des pieds parce qu’ils ont l’impression de ne pas être véritablement rejoints dans ce qui fait leur vie, et d’être infantilisés par une hiérarchie trop prégnante.

Les manques, nous les voyons bien. Par exemple le manque de prêtres. Mais notre réponse, le plus souvent, c’est de nous tourner vers l’évêque en lui demandant de nous envoyer un prêtre !

Et si nous nous retrouvions entre nous pour nous demander ce qu’il nous manque pour que notre communauté soit vivante et appelante, notamment pour des jeunes ?

Quelles responsabilités sont essentielles à la vie de notre communauté ? Et quel type d’homme ou de femme attendons-nous pour y répondre ?

Et si nous nous demandions qui nous pourrions appeler parmi les membres de notre communauté pour remplir telle ou telle fonction, et ensuite aller en parler à l’évêque qui donne mission au nom de l’Eglise ?

Les crises de l’Eglise ont permis, tout au long de son histoire, un profond renouvellement. Le renouveau vient rarement de la hiérarchie. Ce n’est pas son rôle. Elle est garante de la communion entre tous.

Nous, aujourd’hui encore et toujours, qui sommes habités par la force de l’Evangile ; nous dont la vie a été bouleversée par la rencontre de Jésus, nous recevons la force de l’Esprit Saint qui nous donne d’inventer des chemins nouveaux.

C’est cette Eglise en mouvement, passionnée par le Christ, que nos contemporains attendent et espèrent.

Frère Nicolas Morin

Peut être une illustration

Connexion