EFFATA ! OUVRE-TOI !
La prophétie d’Isaïe est dans tous les cœurs au temps de Jésus. Elle soutient l’espérance d’un peuple opprimé, asservi. « Dites aux gens qui s’affolent : « Soyez forts, ne craignez pas. Voici votre Dieu. Il vient lui-même et va vous sauver. » Quels seront les signes de sa venue ? « Alors se désileront les yeux des aveugles et s’ouvriront les oreilles des sourds. » Toute la création sera régénérée, sauvée : « La terre brûlante se changera en lac, la région de la soif, en eaux jaillissantes. » Aussi, lorsque Jean-Baptiste questionnera Jésus « es-tu celui qui doit venir ? », en répondant « les sourds entendent et les aveugles voient » (Mt 11,3), Jésus révèlera à la fois son identité et sa mission. Marc reprend ici ce même passage. En Jésus, la promesse de Dieu s’accomplit. Il vient sauver l’humanité du mal sous toutes ses formes, une humanité réconciliée avec Dieu, avec elle-même et toute la Création.
« Des gens lui amènent un sourd muet et supplient Jésus de poser les mains sur lui. » Cet homme se laisse porter par la foi de ses amis. Quelle belle image de la communauté chrétienne ! Une communauté d’hommes et de femmes fragiles qui se portent les uns les autres afin de se laisser toucher, guérir par Jésus.
Jésus emmena cet homme à l’écart, « lui mit les doigts dans les oreilles et, avec sa salive, lui toucha la langue ». Jésus agit comme le potier façonnant son œuvre, à l’image du Créateur. Il crée de ses mains une humanité nouvelle, libérée du mal. « Il a bien fait toutes choses », s’exclame la foule émerveillée, clin d’œil au récit de la Création : « Et Dieu vit que cela était bon. »
« Effata ‒ Ouvre-toi ! » Parole bouleversante de Jésus à cet homme enfermé dans sa surdité. Jésus ne pose aucune condition à sa guérison. Cet homme a-t-il même conscience de son enfermement ? Il lui faudra faire l’expérience concrète de la force de la parole de Jésus qui le libère et ouvre tout son être pour prendre conscience de l’enfermement qui était le sien. Là est bien souvent notre drame. Nous nous habituons à nos vies étroites, repliées sur notre petit monde. Comment soupçonner qu’une autre vie est possible tant que l’on n’en a pas fait l’expérience ? Comment ouvrir grand la porte si d’autres, par leur exemple, leur amitié, leur foi, ne nous accompagnent pas sur le chemin ?
« Effata ‒ Ouvre-toi ! » Je laisse résonner cet appel dans ma propre vie. Y a-t-il des aspects de ma personnalité, de mon histoire, qui restent ligotés ? Y a-t-il des portes fermées ? Je demande à Jésus la grâce de me laisser habiter par sa parole.
« Effata ‒ Ouvre-toi ! » C’était l’appel pressant du pape Jean XXIII annonçant l’ouverture du concile Vatican II. Il rêvait d’une Église qui n’aurait pas peur d’ouvrir grandes les fenêtres sur le monde afin d’entrer dans un dialogue exigeant, respectueux et confiant. C’est aussi l’appel de notre pape François alors que le synode sur la synodalité entre dans sa dernière phase.
Seigneur Jésus,
Je me laisse rejoindre par ta parole
au plus profond de mon être : « Ouvre-toi ! »
Viens délier tout ce qui est ligoté.
Viens redresser ce qui est tordu.
Viens ouvrir ce qui est fermé.
Tu veux m’enfanter à une vie nouvelle.
Rends-moi la joie d’être sauvé.
Donne-moi de vivre libre comme toi.
Frère Nicolas Morin