Homélie du lundi 1er novembre 2021, Toussaint

« La vocation universelle à la sainteté » (Vatican II)

Dans ce temps où l’Église est fortement secouée et apparaît plus comme une croix qu’une mère protectrice, il serait bon, à la Toussaint, de rappeler ce que le Concile Vatican II appelait « la vocation universelle à la sainteté » (Lumen Gentium 40). Il est de plus en plus urgent de ne pas se laisser tomber dans l’amertume ou de quitter l’Église avec fracas, mais de s’engager personnellement ou en communauté sur la voie de la sainteté.

Sans oublier de nommer et de combattre tout ce qui perverti, détruit et anéanti les êtres les plus fragiles de nos sociétés. Le Pape Paul VI disait avec force : « Le mal n’est pas seulement une déficience mais une efficience, un être vivant spirituel perverti et pervertisseur. Réalité terrible, mystérieuse et effrayante. (15-11-72).

On n’a pas toujours bien parlé de la sainteté. On a trop souvent présenté les saints comme des hommes et des femmes arrivés à la perfection dans tous les domaines de leur vie. Des êtres hors du temps et de la société. Saint Bonaventure disait « que la perfection de François d’Assise lui permit de vivre au milieu des hommes sans plus de souillure qu’un ange ! (Prologue). Mais c’est un fantasme, car c’est confondre sainteté et perfection. On comprend la réaction de Jean-Paul Sartre : « La sainteté me répugne avec ses sophismes, sa rhétorique, et sa délectation morose. »

La petite Thérèse de Lisieux lui a bien répondu en disant : « Je suis trop petite pour escalader le rude escalier de la perfection… Mais Toi tu peux descendre ! » Elle avait tout compris ! Il ne s’agit pas de monter vers Dieu dans une ascèse effroyable mais d’accepter qu’Il descende dans toute notre vie, même dans les aspects les plus ténébreux et les plus intimes. Le saint n’est pas une personne parfaite mais quelqu’un qui s’est laissé envahir par la beauté de Dieu malgré toute la pesanteur de sa vie.

C’est ainsi que la poétesse Marie Noël osait dire à son Seigneur : « Mon Dieu je ne vous aime pas… et je m’ennuie avec vous. Peut-être même que je ne crois pas en Vous. Mais regardez-moi en passant. Abritez-vous un moment dans mon âme. » Elle écrivait même : « L’heure terrible où Dieu n’est pas vrai et où je continue à l’aimer quand même. » Elle sera sans doute canonisée car le saint n’est pas celui qui n’a jamais de doute ni d’imperfection mais celui qui s’est laissé envahir par la passion de Dieu et qui, malgré son apparente absence, continue à l’aimer.

En ce jour de la Toussaint, la liturgie nous propose les Béatitudes. Le pape François nous dit que c’est « la carte d’identité du Chrétien ». Et il ajoute : « Si quelqu’un d’entre nous se pose cette question « comment fait-on pour parvenir à être bon chrétien ? » (ajoutons à être saint) la réponse est simple : il faut mettre en œuvre, chacun à sa manière, ce que Jésus déclare dans le Sermon des béatitudes. (La joie et l’allégresse No 63).

Les saints sont toujours des gens ordinaires, très ordinaires, mais habités par une passion extraordinaire, celle de vivre chacun à sa manière les Béatitudes. À force de contempler Jésus et de le suivre sur le chemin, ils sont devenus pauvres, doux, miséricordieux, purs, artisans de paix et même parfois persécutés pour la justice. Les Béatitudes se sont distillées lentement dans leur cœur, non pas à la force des poignets, mais en regardant Jésus, en écoutant l’Esprit Saint. Le Pape écrit encore : « Car nous ne pouvons vivre les Béatitudes que si l’Esprit Saint nous envahit avec toute sa puissance et nous libère de la faiblesse de l’égoïsme, du confort, de l’orgueil » (No 65).

Nous n’avons pas à copier les saints ; ils vivaient dans un autre contexte social que nous et n’avaient pas le même tempérament. Cela pourrait même nous éloigner de la route unique et spécifique que le Seigneur veut pour nous. Ce qui importe, c’est que chaque croyant discerne son propre chemin et mette en lumière le meilleur de lui-même. Et se dire que dans les moments les plus sombres de notre vie le Seigneur nous appelle tous à la sainteté.

« La sainteté ne te rend pas moins humain car c’est la rencontre de ta faiblesse avec la force de la grâce »

(Pape François La joie et l’allégresse No 34)

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