La Sainte Famille
Il n’est pas rare d’entendre dire que l’Eglise parle presque toujours du couple idéal, des familles sans grands problèmes où le ciel est toujours bleu. Et l’on cite en exemple la Sainte Famille : Marie, Joseph, l’Enfant. Mais que sait-on d’eux ? La Sainte Famille peut-elle être un modèle qui informe, c’est à dire qui donne forme à nos familles d’aujourd’hui ? Que dire à ceux qui ont échoué et que le discours sur la famille idéale blesse plutôt qu’il ne réconforte ? Dieu a-t-il une bonne parole pour ceux-là ? Et L’Eglise, a-t-elle une parole de compréhension et d’amour pour ceux qui se sont séparés. C’était le grand débat au Synode. Le Pape François parle tout le temps de miséricorde en face de ceux qui brandissent la Loi !
Qu’il est difficile de traverser une longue vie à deux, tout en restant dans l’amour, la tendresse et le pardon ! Que de crises, d’événements et de souffrance qu’on n’avait pas prévus au départ. Qu’il est difficile d’élever les enfants tout en respectant leur chemin, surtout dans un monde où la transmission des valeurs ne se fait pas facilement. Mais les Evangiles nous parlent aussi de crise dans la Sainte famille. Que de drames pour les parents dès la naissance de l’enfant . On doit déposer le petit dans une mangeoire, car il n’y avait pas de place à l’hôtellerie. Et puis la fuite en Egypte ,tellement réactivée aujourd’hui par tous ceux qui doivent quitter terre, relations culture avec l’angoisse d’être reconduit à la frontière. Ne devait-ont retrouver la même angoisse dans les yeux de Joseph et de Marie ?
Aujourd’hui, Luc nous parle d’une autre crise : la fugue de Jésus. Celui-ci a douze ans, c’est l’âge de la maturité en Israël. L’âge aussi de prendre sa place dans le peuple. Jésus fait donc son pèlerinage à la ville sainte. Il regarde le Temple, les soldats romains, mais aussi la foule des mendiants , des aveugles. Il écoute les discussions entre les rabbins et les scribes. Il respire à plein poumon l’air du temps !
Mais, c’est ici que l’histoire commence à se corser. Au lieu de suivre ses parents et le convoi des pèlerins, Jésus reste à Jérusalem, et le voilà assis dans le Temple au milieu des docteurs de la Loi . Luc ajoutera : « Il les écoutait et leur posait des questions ». Phrase extrêmement importante pour l’humanité de Jésus. Il commence sa mission par écouter et non par enseigner. Jésus s’est d’abord imprégné de la sagesse d’Israël transmise par les spécialistes de la Loi. Avant de parler, il écoute. Avant la bouche, il y a l’oreille ! « Ecoute Israël »
Quand Jésus ouvre la bouche, on ne peut déjà que s’extasier de son intelligence et de la profondeur de sa pensée. On aimerait savoir ce qu’Il disait. Sans doute était-ce lumineusement simple ! Ici, tout paraît merveilleux : des vieillards qui écoutent un enfant superbement doué. Mais pendant ce temps, ses parents sont affolés. Angoissés, ils le cherchent pendant trois jours.
Et Marie le retrouvant dans le Temple lui dira, ce que toute mère aurait dit, dans les mêmes circonstances : « Pourquoi nous as-tu fais cela ?Vois comme nous avons souffert en te cherchant, ton père et moi ! » La réponse de Jésus est mystérieuse et désarmante : « Ne saviez-vous pas qu’il me faut être chez mon Père ». Ils croyaient avoir retrouvé leur enfant, et voilà qu’il leur échappe à nouveau ! Pauvre Joseph, après l’étonnement de la naissance, la fuite en Egypte, le voilà encore bousculé par une incompréhension. Et Marie « gardait tout cela dans son cœur ». Le oui continue de s’approfondir dans la douleur et la joie. Car déjà la séparation et l’incompréhension s’installent dans le cœur des parents. Ils devront souvent redire la parole de Jean-Baptiste à propos de Jésus « Il faut qu’il grandisse et que moi, je diminue » (Jean III 30)
Quelques années plus tard, l’enfant devenu adulte, fera une deuxième fugue, mais, cette fois, ce sera à trente ans. Parti parler aux foules de son Père, de son Règne de miséricorde, de sa tendresse pour les petits, Il rencontrera, à nouveau, les docteurs de la Loi. Mais, à ce moment là, ils ne s’extasiaient plus de son intelligence ni de ses réponses. Ils chercheront au contraire à l’éliminer. Alors, il retourna chez son Père, mais par la porte de la Croix !
« Vos enfants ne sont pas vos enfants.
Ils sont les fils et les filles de l’appel de la Vie à elle-même.
Ils viennent à travers vous mais non de vous ». (Khalil Gibran) M de W