Le bon berger

Lors d’une marche en montagne, je suis tombé sur un magnifique bercail en pierres sèches dans lequel le berger mène ses brebis la nuit pour les protéger des prédateurs, notamment du loup. Il y a juste une ouverture, et l’on sait qu’en Palestine au temps de Jésus, le berger se couchait en travers : il était ainsi la porte des brebis, celui qui leur assurait la protection.
Jésus raconte donc l’histoire de brebis en sécurité dans leur bercail, dans leur enclos. Mais voici que surviennent de faux bergers, des voleurs et des bandits, nous dit Jésus. Que font-ils ? Ils surviennent dans l’enclos par effraction. Ils ne passent pas par la porte mais escaladent le mur. Ils violent en quelque sorte l’intimité des brebis, ils font irruption dans leur espace. Et s’ils leur parlent, ce n’est pas pour les faire sortir mais plutôt pour les endormir, mettre la main sur le troupeau, l’enfermer sous leur domination. Les brebis ne s’y trompent pas qui n’écoutent pas leur voix et refusent leur autorité.
Arrive un autre berger, le seul vrai, le véritable berger, nous dit Jésus. Que fait-il ? Il se présente à la porte, au grand jour, et il attend que le portier lui ouvre. Le vrai berger est infiniment respectueux de ses brebis. Il frappe à la porte mais n’entrera que si les brebis lui ouvrent. Une fois dans l’enclos, le berger appelle chacune des brebis par leur nom. Chacune de ses brebis est unique et le berger entre dans une relation personnelle avec elles, il leur parle.
Que leur dit le berger ? On ne se sait pas. Peut-être que la voix elle-même est plus importante que les mots ? Ce que les brebis entendent, c’est la tendresse de ce berger pour chacune d’entre elles. Sa voix sonne juste, elle ne ment pas. Elle rejoint les brebis au plus profond d’elles-mêmes. Elle est appel à la vie. Et vivre, c’est se risquer à sortir de son enclos qui, certes, procure bien-être et sécurité, mais qui peut aussi devenir une prison, symbole de tout ce qui nous enferme sur nous-mêmes.
C’est pourquoi, nous dit Jésus, le berger les pousse dehors. Les brebis se laissent faire parce qu’elles écoutent sa voix, elles lui font confiance. Elles font le pari d’une vie plus grande, plus large que leur petit monde connu.
Quand il les a fait sortir toutes, il marche devant elles. Jésus ouvre un chemin, indique une direction, donne du sens. Et les brebis le suivent. Elles auraient pu prendre un autre chemin, Jésus ne les force pas, il les appelle et leur ouvre un avenir.
En méditant cette parabole m’est venue l’image d’un de mes oncles, prêtre. Après avoir longtemps enseigné, il a été nommé directeur d’un établissement scolaire. Chaque matin, il tenait à être à la porte de l’école pour accueillir personnellement chaque élève. Au bout de quelques jours, nous disait-il, il connaissait le prénom de chacun. Lors de son décès il y a quelques années, plusieurs de ses anciens élèves ont tenu à témoigner à peu près en ces termes : « J’étais en échec, je n’avais aucune confiance en moi, comme enfermé, et le Père Morin a su m’accueillir tel que j’étais, il m’a fait confiance et j’ai su, moi aussi, que j’étais capable d’y arriver. Il m’a ouvert un avenir. »
Je pensais aussi à un autre berger, Moïse, qui lui aussi a fait sortir son peuple de la terre de son esclavage, de tous ses enfermements, pour le mener vers la Terre Promise.
Seigneur Jésus, bon berger
Tu frappes à ma porte,
Tu viens me rejoindre dans ma vie telle qu’elle est,
Et tu m’appelles par mon nom, tu me connais mieux que moi-même,
Tu m’invites à me risquer à sortir, à quitter tout ce qui m’enferme,
Tu traces un chemin, tu ouvres un avenir.
Tu m’invites aujourd’hui, à ta suite, à être un bon berger pour mes frères.
Donne-moi d’écouter ta voix et de te suivre sans peur.

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