Homélie du dimanche 17 avril : Pâques Résurrection du Seigneur – Année C

Pour Pâques, on aurait préféré un texte plus fort, une Résurrection plus éclatante, des signes plus probants, un Jésus éclatant de lumière piétinant sa croix comme sur les icônes. Et Saint Jean nous parle d’un tombeau vide, d’un linceul resté là, d’un Seigneur enlevé. Que les signes sont pauvres pour fonder une religion, orienter des vies, changer la Vie. Jean, d’ailleurs, évoque une aube mal dégagée des ténèbres. Le scandale de la mort plane encore !

Les femmes et les disciples avaient tellement misé sur cet homme. Il était tellement autre. Il y avait une telle unité entre son « dire Â» et son « faire Â». Son regard, sa parole et ses gestes étaient restés incrustés dans le cÅ“ur des disciples. Il fallait du temps pour se séparer d’un tel homme. Le deuil ne pouvait se faire en un jour. S’il avait déçu, on aurait pu s’accrocher à la déception pour que la souffrance soit moins forte. Mais il a guéri la Marie, il a regardé Pierre après son reniement et quel regard ! Et Jean sent encore son cÅ“ur battre si fort !

Regardons les au tombeau : Peut-être qu’ils nous aideront à faire le passage du cérébral au cÅ“ur, du sur-place à la marche, voire à la course…car tout le monde court dans cet Evangile ! Regardons d’abord Marie de Magdala. Une femme et pas n’importe la quelle ! Luc nous dit qu’elle a été guérie de 7 démons. C’est un plénitude car elle avait du tempérament ! Nikos Kazantzakisdira  très justement: Â«  On l’accusait d’avoir en elle 7démons  mais  elle avait 7 couteaux dans le cÅ“ur Â»

Marie de Magdala avait suivi Jésus depuis la Galilée. A la Croix, elle regardait à distance.Son cÅ“ur nela laisse pas en paix, il faut qu’elle revienne auprès de Celui  qu’elle a accompagné jusqu’à la croix. Elle vient dans une démarche de tendresse et de pitié pour retarder la séparation. C’est le temps des pleurs, du désarroi, du « ce n’est pas possible Â».

Elle doit encore apprendre à vivre dans l’absence, à gérer son deuil. Mais elle découvre un tombeau vide : « On a  enlevé le Seigneur de son tombeau ! Où est-il ?Et comme dit le Cantique des Cantiques : Â« Avez-vous vu celui que mon cÅ“ur aime ? Â»(III 3) Jésus sera t-il persécuté jusque dans la tombe ? C’est avec un cÅ“ur chaviré qu’elle court trouver les deux disciples : Pierre et Jean.

Avec Pierre et Jeanc’est de nouveau la course. « Ils courent ensemble Â» Il y une proximité chez ces deux hommes présents à la  Passion .Elle fut douloureuse pour les deux :  Pierre dans son reniement. Jean dans sa fidélité. Mais Jean court plus vite et arrive le premier au tombeau. Est-ce seulement l’âge ? N’est ce pas l’amour qui donne des ailes ? N’est ce pas tout simplement l’élan du cÅ“ur ?

Jean, donc, arrive le premier, voit le linceul, mais ne rentre pas dans le tombeau . Il laisse passer Pierre car il a le sens de la hiérarchie. C’est Pierre qui devra annoncer, en son temps, le mystère de l’Absent. Pierre rentre le premier dans le tombeau et il regarde le linceul, le linge qui a recouvert la tête. Il s’interroge sans comprendre !

Jean rentre à son tour. Il découvre le signe d’une présence : Le disciple bien aimé a tout saisi. Car l’amour seul a les yeux clairs :L’Evangile nous dira : « Il vit, et il crut Â». Bien sûr que les signes sont fragiles, mais seul l’ amour leur donne sens, fait signe ! Bien sûr que les signes sont modestes. Nul n’a jamais vu Jésus sortir du tombeau. Il ne s’est pas montré ressuscitant. Notre Dieu restera toujours caché. Pascaldira : « Toute religion qui ne dit pas que Dieu est caché n’est pas véritable Â».

Oui, un tombeau vide, mais une absence pour dire une infinie Présence !C’est vrai, on ne parle pas facilement de la Résurrection,  pas plus qu’on ne parle aisément de la Vie, de l’Amour, de tout ce qui est vivant. Mais le signe modeste d’hier traverse encore notre chair  aujourd’hui : Progressivement, amoureusement, infiniment.Il traversera notre cÅ“ur tel un charbon ardent ! La pierre roulée, le linceul roulé. Voilà la mort bien roulée !

Et si ma vie pouvait être aussi retournée !

Frère Max de Wasseige

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